Je sais, cette allusion à l’épique moment de recadrage de Robert P. par Aimé Jacquet dans les vestiaires de l’équipe de France de ballon rond est sans doute mal venue en ces jours d’après GdB footballistique… mais j’y avais pensé avant que nos voisins helvètes ne nous chassent de la compétition. Mes excuses aux attristés, ainsi qu’aux antifoot. Et puis le parallèle me faisait rire. Même s’il n’a pas grand-chose à voir avec le sujet du jour.
Animer, c’est donner de la vie à un groupe. C’est aussi et surtout donner du sens à une œuvre collective. Mais faut-il être animatrice dans l’âme pour piloter la troupe de 15h à 16h en salle « Belle-Île » tous les mercredis ? Faut-il être un acteur-né pour maintenir un niveau de concentration élevé devant les 42 diapos de la « prézz » du projet ? Quelles sont les qualités requises pour animer ? Quelle formation tamponne la compétence d’un salarié à porter le costume de grand orateur ?
Je ne pense pas qu’il faille impérativement être manager pour piloter une réunion, voire un projet. La mission qui a été initiée par les supérieurs et confiée à une équipe est réfléchie. La casquette de capitaine de cérémonie sise sur la tête de celle-ci ou de celui-là, c’est une preuve de confiance et de responsabilisation. Le lien de subordination n’est pas une obligation. Sans parler de la désacralisation hiérarchique qui se fraie un chemin au sein des jeunes pousses. C’est bien la compétence relationnelle et fédératrice qui est de mise. Mais pas que.
L’amont de l’animation : organisation et préparation. Cette programmation de rendez-vous sur un temps donné doit répondre aux QQQOCCP de circonstance. Comment pourrai-je présenter en quelques lignes le projet à mes coéquipiers sans une amorce structurée ? Et ne dit-on pas chez nos camarades commerciaux qu’une bonne préparation, c’est 80% de la vente ? Le contenu de cette méthode infaillible d’analyse de situation doit rester affiché en première page, comme un avant-propos. Jusqu’à la fin du projet.
La pédagogie adaptée aux adultes (l’andragogie) est un vaste tableau de bord où l’alignement des curseurs qui régissent la communication interne (« Écoute active », « Parole impeccable », « Posture vers l’avant », « Comportement assertif », « patience sereine », etc.) est parfois complexe à harmoniser. Nous sommes doués ici, moins là. Mais le ciment de cette pédagogie, c’est la démocratie responsable. Être animateur, ce n’est pas militariser sa garde-robe et tenir le crachoir pendant 7H à la sauce Castro, les poings serrés et menaçants, le regard noir et la parole haute. Être animatrice, C’est faire participer, impliquer, mettre l’autre dans la lumière, valoriser l’humain et le sujet, donner la parole, sensibiliser celui-ci sur l’intérêt du projet, réclamer l’avis de l’experte de la question (ligne 4 de l’ordre du jour) quand celle-ci se serait bien fondue dans le décor, respecter le timing et l’ordre des sujets, conclure, s’engager ensemble, se projeter, etc. Une mini démocratie à la Lewin, en somme, orientée vers la complémentarité pour avancer. « Un plus un égal trois ».
Le sens des responsabilités de chacun est parfois mis à mal au sein d’un groupe. Alors c’est bien à l’animateur de montrer l’exemple. Légère avance, préparation de la salle, projection prête, téléphone éteint au fond de la poche (le « allo ? je peux pas te répondre, je suis en réunion », c’est FINI !.. désolé, il fallait que ça sorte…) et le combo regard + sourire à l’arrivée des membres. Un écrin parfait procure au produit une attirance particulière. Ici, c’est la même chose.
Ce sens des responsabilités nous oblige aussi à la transparence et à l’honnêteté. Des règles ont été émises et partagées, leur respect est incontournable. A l’animateur d’endosser le rôle du « flic gentil » en cas de dérapages (retards, absences non programmées, travail non effectué, téléphone qui sonne… argh…). Il ne sanctionne pas, il rappelle le serment.
Côté formation à l’animation ? L’enchaînement des expériences, bien sûr. Avec l’analyse des forces et points d’amélioration à chaque session pour la mise en place d’un plan d’action toujours plus efficient. Et puis l’accompagnement de formatrices et formateurs compétents (vous me voyez venir ?.. le programme des réjouissances est disponible sur ce site), surtout pour les néophytes. Mais aussi pour les habitués rompus à l’exercice, qui pourraient manquer de recul sur leur prestation.
Ajoutez à tout cela de la créativité, de la prise de hauteur, de l’humour et de la décontraction. S’agirait pas de se faire recadrer par Aimé !
Edouard Baudry, le 30 Juin 2021